Comment j'ai aidé Mony à lire malgré l'absence de langage
Mony n'avait pas le langage
Mony n’avait pas le langage. Elle a été refusée de scolarisation pendant trois années de maternelle. À six ans, elle était accueillie seulement six heures par semaine en grande section. Et personne ne voulait lui apprendre à lire parce qu'elle ne parlait pas et ne comprenait pas le langage : ni l'école, ni l'orthophoniste. Alors j'ai pris les choses en main.
Trouver la bonne méthode d'apprentissage
Je lui montrais une lettre avec mon doigt, je produisais le son correspondant, lentement, en articulant bien, en exagérant les mouvements de la bouche pour qu’elle puisse les voir et les reproduire. C’est ainsi que nous avons commencé.
J’ai tenté la méthode Borel-Maisonny, qui associe à chaque son un geste facilitant la reconnaissance auditive et visuelle. J’ai aussi essayé les Alphas, qui donnent aux lettres des visages et des voix pour créer un univers ludique. Mais Mony n’adhérait à aucune des deux : les gestes la perdaient, les personnages l’embrouillaient. Elle avait besoin de concret, de direct, sans surcharge cognitive.
Le déclic : se concentrer sur les sons
J’ai donc fait le choix de m’appuyer uniquement sur le son des lettres, pas sur leur nom. Pour un enfant sans langage, apprendre "bé" ne l’aide pas à lire le mot "banane". Il faut qu’elle entende et reproduise simplement le son "b". Le lien direct entre le signe et le son, sans détour, c’est ce qui a fonctionné.
J’ai adopté une méthode toute simple, artisanale : un classeur de syllabes. Un grand classeur à quatre anneaux, avec une lettre par demi-page. À gauche, les consonnes en bleu. À droite, les voyelles en rouge. Les pages tournent vers le haut pour composer les syllabes en les associant. Cette présentation épurée et visuelle a permis à Mony d’associer progressivement les sons pour former des syllabes.
Des progrès concrets et encourageants
Peu à peu, Mony a commencé à reconnaître les sons et à les associer pour former des mots simples. Sa concentration et sa détermination ont porté leurs fruits. Aujourd'hui, elle lit avec plus d’aisance et prend confiance en elle.
Ce qui a été le plus marquant, c’est que la lecture a déclenché le langage chez Mony. En apprenant à lire, elle a progressivement commencé à comprendre certains mots et à les utiliser. C'est grâce à cet apprentissage que le langage a pu émerger, ce qui est assez fréquent dans ce type de dysphasie. Cela montre l'importance d'apprendre la lecture le plus tôt possible pour les enfants présentant ce profil.
Je me souviens de l'émotion que j'ai ressentie la première fois qu'elle a réussi à associer des sons pour former un mot. Ce n'était pas juste une petite victoire, c'était une immense fierté, pour elle comme pour moi. Malgré les doutes et les difficultés, Mony n'a jamais abandonné. Elle avançait, pas à pas, avec cette même détermination qui la caractérise tant.
À huit ans, la lecture était d’ailleurs la seule chose positive que l’école reconnaissait chez Mony. Même si elle a été déscolarisée à dix ans, cela montrait à quel point ses efforts étaient visibles malgré les difficultés rencontrées.
Borel-Maisonny et les Alphas : des méthodes qui peuvent fonctionner
Même si ces méthodes n'ont pas convenu à Mony, il est important de souligner que la méthode Borel-Maisonny et les Alphas fonctionnent très bien pour d'autres enfants DYS. Chaque enfant ayant des besoins spécifiques, ces méthodes peuvent être très efficaces pour certains, en particulier pour ceux qui ont besoin d'un support visuel ou d'un univers ludique pour associer les lettres et les sons.
Mon conseil aux parents
Accompagner un enfant DYS demande une immense patience et beaucoup de persévérance. Mais chaque progrès, aussi minime soit-il, est une grande victoire. Je ne regrette pas une seule seconde d'avoir pris les choses en main pour Mony. Aujourd'hui, en la voyant lire avec plus d'aisance, je suis convaincue que ça en valait la peine.
Chaque enfant DYS est unique et ce qui fonctionne pour l'un ne convient pas toujours à l'autre. Mais parfois, simplifier les méthodes et aller à l’essentiel peut faire toute la différence. Gardez espoir et ajustez les stratégies en fonction des besoins de votre enfant.
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